Pratiquer régulièrement un sport, chacun en connaît les bienfaits sur la santé mais qu’en est-il des bénéfices sur le psychisme ?
Redécouvrir son corps au travers d’une nouvelle pratique sportive
S’inscrire dans une nouvelle activité sportive c’est avant tout découvrir un nouvel environnement, et comprendre les réactions de son corps. Il s’agit de sortir de sa zone de confort, de ce que l’on maîtrise, ou encore des limites que chacun se met pour aller vers l’inconnu. C’est sortir d’une routine pouvant s’avérer mortifère pour rejoindre un état instable, celui de la vie, de l’intranquillité roborative, de ce qui s’éprouve.
Le choix d’une pratique sportive est guidé par la valeur que l’on donne à cette nouvelle activité. Plus l’activité aura de valeurs à vos yeux plus vous consentirez à y accorder du temps, de l’énergie et mieux vous ressentirez les bénéfices narcissiques liés à cette implication.
Ressentir, tester et progresser
Quant à la pratique elle-même, elle représente avant tout le corps en jeu, le corps basé sur les sensations, les ressentis, ce que l’on appelle le corps érotique. Il s’agit de l’image inconsciente du corps issue des sensations corporelles infantiles gravées dans le psychisme. La pratique sportive permet ainsi une reconnexion inconsciente à cette part originelle infantile.
S’entraîner dans une discipline amène à appréhender les sensations, à tester ses possibilités, c’est agir de son corps sur son corps.
Le sportif maîtrisant sa discipline éprouve la sensation d’être un corps bien ancré, au sens de l’image de base composant l’image inconsciente du corps selon Françoise Dolto (1984). Cette image attribue le sentiment d’exister, le sentiment instinctif d’être, donnant la possibilité de dire « je me sens moi-même ». Car l’engagement dans l’acte sportif permet de ressentir la résistance du corps en soi, la vie (Dejours, C., 2009).
Se faire plaisir pour dépasser ses limites !
De plus, l’entraînement sportif comme dans tout apprentissage repose sur le principe de satisfaction représentant le moteur de nos choix.
Ce moment sportif allie corps et plaisir, le plaisir de soi sur soi qui pourrait être qualifié d’auto-érotisme. L’auto-érotisme est relié au narcissisme primaire, coeur du noyau de la structure psychique qui fonde la force du vivant. Il s’agit donc de ce qui pousse lors de la pratique à continuer malgré les difficultés, à se sentir actif, vivant et conquérant. Evidemment cette force du vivant ainsi cultivée va se déployer dans d’autres espaces de vie non sportifs.
La compétition comme moyen de canaliser ses émotions
Lorsque la compétition approche certains, pour faire baisser la tension qui se manifeste, vont mettre en place des rituels, remettent de l’ordre, ou préparent méthodiquement leurs affaires. Ce sont autant d’illusions de maîtrise qui donne le sentiment de garder le contrôle sur l’environnement face à l’inconnu du challenge.
Quant à la compétition, cette dernière constitue le périmètre dans laquelle les mouvements pulsionnels se déploient. Cela se manifeste par des rivalités conscientes ou inconscientes et des pulsions morbides agressives dirigées contre le monde extérieur, contre un autre ou des autres. Et c’est parce qu’existe le cadre et les règles de la pratique sportive en compétition que l’agressivité peut s’y déployer sans culpabilité.
Le sport pour valoriser ses aptitudes !
La pratique sportive peut également mener à la sublimation, mécanisme de défense à encourager qui ne coûte pas d’énergie psychique mais en rapporte. Lorsque le manque constitutif de tout être humain le pousse à investir l’objet compétition, il s’agit alors de reconnaître le désir qui s’exprime, celui par exemple d’obtenir la reconnaissance de ses proches ou encore de se prouver que l’on est capable ou pour d’autres de se dépasser.
Ce manque est sublimé par l’expérience dans laquelle s’inscrit le sportif dans une réorientation de sa pulsion vers « une impossible possibilité » (Saint Girons, 2002), un impossible finalement réalisable avec l’idée de faire des choses que l’on ne se pensait pas capable de faire. L’athlète lors de la compétition a accompli un acte sportif dont il est à l’origine et dont il peut se prévaloir, faisant partie de ce qu’il nomme de lui en une identité de sportif.
Vers une meilleure connaissance de soi
« La transposition de libido d’objet en libido narcissique qui se produit ici entraîne manifestement un abandon des buts sexuels, une désexualisation, donc une sorte de sublimation » (Freud, 1923, 2015)
L’acte conduit le sportif à explorer son corps et son environnement dans la création d’une histoire singulière dans le traçage d’une voie originale qui mène à mieux se connaître, se définir et s’identifier.
Ainsi se tourner vers une pratique sportive présente de nombreux bénéfices, ceux :
- de s’inscrire dans la pulsion de vie,
- d’appréhender de nouveaux ses sensations corporelles,
- d’éprouver le plaisir de son corps en mouvement nourrissant ainsi la force du vivant,
- de s’inscrire dans un dépassement de ses propres limites procurant un retour positif en termes d’estime de soi,
- d’intriquer les pulsions agressives et le pulsion de vie en une sublimation permettant d’accéder à un renforcement de soi.
Vous ai-je convaincue ? Si c’est le cas, à vous désormais de choisir le sport qu’il vous plaira de pratiquer, laissez vous guider par vos envies, vos désirs et prenez du plaisir dans votre pratique c’est ce qui vous permettra de vous y inscrire dans la durée.
Bibliographie
Dejours, C., Corps et psychanalyse, in L’information psychiatrique 2009/3 vol. 85, 2009
Dolto, F., L’image inconsciente du corps, Editions du Seuil, 1984
Saint Girons, B., A quoi sert la sublimation ? in Figures de la psychanalyse 2002/2 n°7, 2002
Freud S., (1923), Le moi et le ça, Edition du Seuil, Paris, 2015.